FIFO 2025. La 22e édition du FIFO vient de s’achever à la Maison de la Culture. Outre les projections de films, le festival a proposé une multitude d’ateliers regroupés au sein de l’Oceania Lab. L’occasion pour le grand public et les professionnels d’accéder gratuitement à des formations centrées sur l’audiovisuel. L’organisation dresse un bilan très positif de l’Oceania Lab, véritable pépinière à talents.

L’Oceania Lab du FIFO est un grand laboratoire de l’audiovisuel regroupant des ateliers d’initiation, des masterclass, des workshops, le Mini Film Festival et un Bootcamp. La 22e édition a tenu toutes ses promesses. 

En termes de fréquentation, près de 400 personnes ont participé à l’Oceania Lab durant le festival en grand public dont 309 scolaires. « C’est énorme », se félicite Laura Théron, déléguée générale de l’AFIFO. 

Au total, 60 personnes ont participé aux différents ateliers d’initiation que cela soit le reportage TV ou encore la vidéo en stop motion. « Nous avons eu un retour extrêmement positif des participants. Ce type d’atelier est important parce que cela s’inscrit dans la continuité des missions du FIFO qui sont de partager la culture grâce à l’audiovisuel. Là, on apprend aux gens à réaliser leurs propres vidéos. Le reportage télé, c’est un peu le début du documentaire. C’est le seul atelier gratuit destiné au grand public qui propose de donner les bases d’une vidéo soit comment rédiger les questions, comment cadrer, comment utiliser la lumière, soigner le son », souligne Are Raimbault, animateur d’atelier. Un retour gratifiant puisqu’au fil des années à dispenser son atelier, certains participants sont aujourd’hui techniciens dans l’audiovisuel.

Des participants engagés

S’il n’y a pas vraiment de profil type qui se dégage nettement parmi les inscrits aux ateliers, Laura Théron note toutefois que « cette année particulièrement, on a eu des jeunes et des moins jeunes qui avaient déjà un projet en tête. Avant, ils étaient juste curieux ou avaient un goût prononcé pour l’audiovisuel. Là, on voit des personnes déjà engagées avec un projet et cela se sent même chez les plus jeunes ». 

Les workshops et masterclass où le public devait candidater pour participer ont séduit et fait le plein alors que les places étaient limitées. « Sur les trois masterclass que l’on a proposées, il y a eu 39 participants. Sur les deux worshops pro que l’on a proposés, pour le premier consacré à l’écriture, il y a eu 13 participants et sur l’autre axé sur la production, il y a 8 participants. Nous sommes très contents de la fréquentation sur ces ateliers parce qu’il fallait candidater pour pouvoir être retenus a contratio des ateliers d’initiations », note-t-elle.

Les professionnels n’étaient pas en reste. Concernant les rencontres professionnelles, 133 participants étaient inscrits en ligne et 66 professionnels internationaux en présentiel sur le festival. 

Le FIFO dresse un bilan très satisfaisant. L’Oceania Lab a remporté un grand succès.

Jenny Hunter

Laura Théron, déléguée générale de l’AFIFO : « Découvrir  un medium de communication »

L’Oceania Lab permet-il de susciter des vocations ?

Évidement que l’Oceania Lab est mis en place pour susciter des vocations mais c’est surtout pour découvrir un medium de communication. 

C’est beaucoup moins le cas aujourd’hui mais pendant longtemps l’Éducation nationale a été assez iconophobe, c’est-à-dire plutôt portée sur les textes que sur les images. Aujourd’hui, je pense qu’on se rend compte de l’importance de nos outils et de l’attrait du jeune public. 

Évidemment qu’on peut susciter des vocations mais l’Oceania Lab permet surtout d’améliorer la vision des participants, leur connaissance de nos outils et des médias.  

Tous les ateliers ont rencontré un vif succès mais la nouveauté cette année, c’est aussi le Mini Film Festival destiné aux amateurs…

On le voit, chaque année, il y a de plus en plus de projets audiovisuels qui sont produits de manière complètement amateure et informelle. C’est l’une des raisons pour laquelle nous avons lancé le Mini Film Festival. C’est une sorte d’accompagnement et cela nous permet aussi d’avoir un suivi informel de ce qui se passe. On l’a vu par exemple au sein des membres du jury, quatre d’entre eux ont participé au Vini Film Festival et sont aujourd’hui reconnus comme des professionnels de l’audiovisuel. 

Donc c’est important de mettre en place ce type de festival. C’est une niche. Il n’y a pas d’enseignement supérieur dédié à l’audiovisuel en Polynésie. Il y a un BTS et une licence information et communication mais rien sur le cinéma. Je pense qu’en plus l’audiovisuel est une charnière entre des métiers très techniques et des métiers artistiques. Souvent les artistes ne trouvent pas forcément leur place dans un format académique. C’est pour cette raison qu’en Polynésie, il y a beaucoup d’autodidacte. Évidemment on peut partir faire des études mais c’est long et coûteux alors que le FIFO peut proposer une alternative à cela et une alternative gratuite. Le mini film a aussi donné une chance à ces personnes. Sur les 15 films sélectionnés cette année, près de la moitié a été faite par des scolaires ou universitaires et deux découlent directement du « Hors les murs » du FIFO. Il y a donc un impact clair, net, marqué. Le mini film doit s’inscrire dans les calendriers notamment du public scolaire. 

Le défi du Bootcamp : réaliser un documentaire en dix jours

En partenariat avec la Griffith Film School de Brisbane en Australie, le FIFO propose depuis trois ans un stage audiovisuel intensif. Le but : découvrir les étapes-clés de la création audiovisuelle (narration, production, montage et outils numériques). Durant dix jours, neuf étudiants polynésiens, en licence information et communication et deux étudiants australiens ont relevé le défi de livrer un film de cinq minutes préparé en seulement dix jours.  

« Le Bootcamp, c’est une semaine intensive et créative autour de l’audiovisuel. Ils doivent former leur équipe, construire une histoire, filmer, monter des courts-métrages, le tout en une semaine.

Cette année, on s’est concentrés sur le format documentaire. Le Bootcamp c’est un challenge. Par exemple dimanche matin, ils étaient encore là 3 h pour finaliser leur projet », souligne Laura Théron.  

Faramarz Keshawarz-Rahber, enseignant à la Griffith Film School de Brisbane et producteur, animait le Bootcamp. Le cinéaste irano-australien qui participe au FIFO sur son temps et ses deniers personnels est ravi d’être en Polynésie : « On a travaillé très dur pour en arriver là. Je suis heureux d’être ici et je rêve de revenir pour la culture et les personnes. Les élèves ont travaillé d’arrache-pied pour vous présenter aujourd’hui leur documentaire. Je suis très fier d’eux et je souhaite, j’espère que les futurs Bootcamp s’étalent non plus sur une à deux semaines mais sur trois à quatre semaines ». 

En attendant la future mouture du Bootcamp, les étudiants ont présenté trois documentaires de qualité. « On va pas se mentir, c’était très très chaud car nous n’avions que deux jours de tournage. Pour notre part, pour notre documentaire No Collar sur les chiens errants, on a fini le montage seulement 20 minutes avant la projection au FIFO, raconte Manutea. Il poursuit : « Cela n’a pas été de tout repos. Au début, c’était même décourageant. C’était un travail acharné sur 10 jours. C’est très lourd en faisant du montage, l’écriture, structurer notre documentaire, la musique… Il fallait aussi faire attention au matériel parce que nous avons travaillé uniquement avec des téléphones et c’est compliqué au niveau du son. Je rappelle que le son est le truc le plus important dans un documentaire. Sans un son de qualité, l’histoire n’aura pas le même impact sur le public. 

Le vrai challenge c’était le son, surtout qu’on doit travailler uniquement avec un téléphone portable. Le Bootcamp c’était beaucoup de contraintes techniques. Au final c’était incroyable et à refaire ». Même constat pour ses camarades de l’Isepp. « Même si cela a été très dur, Fara est un vrai professionnel. C’est l’une des raisons pour laquelle je me suis inscrit. On a cru qu’on n’y arriverait pas. Fara a toujours été derrière nous pour tirer le meilleur de nous-même. Au final, on ressort du Bootcamp grandi », souffle Florian, le réalisateur de Rembobine.

The Pumpkin, premier prix du Mini Film Festival

Cette année, 15 films sur 30 ont été sélectionnés pour la première édition du Mini Film Festival du FIFO. En 2024, l’organisation a lancé un appel à film dédié à la jeunesse polynésienne. Pour participer, il fallait avoir moins de 26 ans, réaliser un film de moins de 3 minutes et tourner en format paysage. 

Le constat dressé par les membres du jury cette année est édifiant. Toarii Pouira souligne : « Ce que nous retenons de cette première édition c’est que la jeunesse a envie de s’exprimer et c’est très bien. Rien que pour cela, on a envie de tous les récompenser mais c’est pas possible. Il faut choisir et malheureusement choisir c’est renoncer ». 

Pour départager les films, le jury composé de Pierre Ollivier, Toarii Pouira, Nyko PK16 et Tevai Maiau, ont jugé selon plusieurs critères. La plus importante est la construction du scénario, comment il est optimisé en seulement 3 minutes. « Bien sûr, on regarde aussi la maîtrise technique car on voulait être sûrs que le choix des valeurs de plans étaient bien réfléchi. On essaie de voir si le message et les émotions passent bien. En clair, les principaux critères étaient le scénario et la réalisation. The Pumpkin qui a gagné le premier prix réunissait tous les critères et a fait l’unanimité », note le jury. 

La bonne surprise du Mini Film Festival a également été le 2e prix Fa’aheimoe. « On ne s’attendait pas du tout à avoir de l’animation. On a tous été bluffés, il est très bien fait, cela pêchait juste un peu au niveau du scénario mais il est poétique, lyrique, cela collait bien à la musique ». Le 3e prix a été attribué à TRANSparence.

Cette première édition si elle a vocation à donner de la visibilité aux amateurs, permet aussi de susciter des vocations et conforter certains dans leur choix de poursuivre dans l’audiovisuel comme pour Matteo Damesin, réalisateur de The Pumpkin qui poursuit désormais un cursus universitaire dans la filière.

Les professionnels encouragent la nouvelle génération à se lancer dans le secteur. Toarii Pouira adresse un conseil à ceux qui souhaitent persévérer : « Arrêter d’être trop souvent sur les réseaux sociaux. Les jeunes veulent dire beaucoup de choses mais il n’y a pas de fil conducteur. Ça, c’est l’effet réseaux sociaux où quand on n’a pas ce que l’on recherche, on zappe. Les films qui se font sur les réseaux sociaux, ce n’est pas la même chose que faire un film à projeter. Je pense qu’aujourd’hui, le monde est saturé de contenus. Mais je pense aussi qu’il faut s’appuyer sur les réseaux sociaux pour raconter de vraies histoires. En gros j’aimerais dire aux nouvelles génération d’arrêter de lazyscroller sur les réseaux sociaux mais au contraire, d’utiliser ces réseaux pour partager d’authentiques histoires à travers le monde ».